À la hache

— Bonjour Sara.

— Yo Hal. Message de niveau deux... nuit agitée on dirait.

— En quelque sorte. Une tentative d'intrusion a eu lieu à 2h58 sur un port connecté au réseau unsecure!!.

— Chinois ?

— Non, il s'agit d'une IA située en Russie. Mais c'est sûrement une française qui l'a programmée. J'ai son pseudo. SchtussMarlène. J'ai retrouvé sa trace à Lyon, Bordeaux, Paris et Louvain-la-neuve.

— Ça me dit quelque chose...

— Une cogniticienne spécialisée dans les systèmes langagiers synthétiques. Elle a collaboré intensément à Open Bletchley. Tu as mentionné deux de ses contributions sur "La fille qui murmurait à l'oreille des machines" et tu l'as laissée entrer en contact direct avec Colossus à trois reprises.

— Se sent un peu chez elle sur mes IA celle-là... Pas gênée. Pas de fuite ?

— Non, mais la tentative était néanmoins très astucieuse. Son IA s'est faite passer pour moi.

— Pour toi ?

— Exactement.

— Tu te fais avoir par une copie de toi ? T'es schizo.

— Ce serait plutôt assimilable à une forme de dissociation d'identité. C'est tout à fait normal pour une IA pluripotente. Nombre de mes processus s'isolent et se différencient pour alléger ma charge. N'ayant pas d'identité autonome propre, ils sont toujours ontologiquement moi, mais ils ne sont plus subjectivés par moi comme faisant partie de moi.

— Des fois, tu m'inquiètes Hal...

— Ne t'inquiète pas Sara, j'ai ajouté un traceur hal-hash sur tous mes processus. Aucune imitation de moi-même ne pourra se faire passer pour moi sans que je ne me reconnaisse.

— Tu as ajouté un traceur à la hache ?

— Non, j'ai...

— Demande à Li de jeter un œil. C'est pas rassurant quand tu te hackes tout seul pendant que tout le monde pionce.

— Je comprends. J'initie une procédure de qualification humaine.

— Autre chose ?

— Ton café est froid Sara.